mardi 6 mars 2012

François Hollande et les lobbies de l'industrie du divertissement

"Les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent" faisait dire Thierry Le Luron (et sans doute ses co-auteurs, Pierre Douglas et Bernard Mabille) à son imitation de François Mitterrand. En cette période de campagne, l'essentiel est de ne froisser personne, surtout quand le candidat n'est pas sûr de ses convictions.

Langue de bois et double discours

Le "double discours" est une technique oratoire qui consiste dire tout clairement, afin que chaque auditeur imagine ce qui n'a pas été dit, selon ce qu'il veut comprendre. Cette technique permet à l'homme politique de dire plus tard qu'il ne s'était pas engager sur tel ou tel point.

Les aller-retours de François Hollande sur HADOPI sont énervant, d'autant qu'ils l'empêche d'être crédible et d'être définitivement vainqueur.

Dernier faux pas en date, la tribune dans le Monde intitulé "François Hollande veut repenser HADOPI". Mais ensuite, ça responsable des sujets numériques, Fleur Pellerin, vient affirmer à Numerama : "Mais non, ce n'est pas le titre que nous voulions donner à l'article..."

La trace des lobbies industriels de l'inculture

Malheureusement, le titre d'une autre tribune sur le site du parti socialiste, intitulé "Réconcilier Internautes et Créateurs". Faire croire que les créateurs et les internautes sont opposés, fait partie de la rhétorique des lobbies des industries "culturelles" et surtout de la SACEM.

Faire croire qu'il n'y a que deux camps (client et "créateurs") est trompeur dans le marcher de la musique. Il y en a au moins trois, les clients, les éditeurs-producteurs et les artistes. Parfois l'éditeur et le producteur sont deux entités. Et même les producteurs peuvent être divisés en deux entités, les financiers et les directeurs artistiques dans certains cas. Après on peut rajouter, la SACEM et les ayants-droits qui peuvent être différents des tout ce qui vient d'être cité (souvent les héritiers).

Voilà ce que cachait "créateurs" ; un tas de gens qui se disputent entre eux la répartitions de ce qu'il récupère. Nous sommes bien loin du faible petit artiste, mais bien devant une industrie bien huilée. En particulier les éditeurs ne font que gérer un catalogue, et n'ont nullement besoin de manipuler ou stocker une quelconque copie des œuvres qu'il représente. ("Ok, nous avons négocié les droits de diffuser tel œuvre. Puis-je un master" / "Je n'en ai pas. Je ne sais pas où il y en a." C'est toujours surprenant la première fois...)

En plus appelé les artistes, des "créateurs" montre qu'on n'a rien suivi.

Richard Stallman, le guru vivant du mouvement du logiciel libre, a dit :

Ça ne me dérange pas que des auteurs (s'il vous plaît, ne les appelons pas "créateurs", ce ne sont pas des dieux) demandent de l'argent pour des copies de leur travail (s'il vous plaît, ne dévaluons pas leur travail en l'appelant "contenu") pour avoir un revenu (le terme compensation nous fait croire qu'il s'agit de réparer un préjudice)

Au delà de ça, il s'agit de la rhétorique des lobbies de la culture, et plus particulièrement la SACEM. .

Or

"Le libéralisme cache de puissants intérêts financiers." Encore l’épouvantail de Google ! François Hollande vante le prix unique du livre, qui est une ineptie économique, et même anti-écologique, car pour préserver le prix des livre à 20€, les éditeurs envoient au pilon les invendus, de sorte qu'aucune solde ne soit possible. Les prix du livre en France sont maintenus artificiellement élevés au moyen d'une rareté créé par les éditeurs, au mépris des intérêts des clients. Pour que la culture soit accessible à tout le monde, il faut que son prix puisse baisser. Le prix d'un livre invendu, doit baisser.

Alors qu'aux USA, l'entente sur les prix est interdite : deux librairies dans la même ville ne peuvent pas vendre le même livre au même prix. En France, cette entente sur les pris est imposée par la loi.

Les consommateurs sont bien dépourvus face à l'oppression des industriels des droits d'auteur qui ont réussis à faire croire qu'ils protégeaient les intérêts des artistes et des consommateurs, alors qu'ils les exploitent tous les deux.

Avec Internet, l'internaute devient le créateur

Le 1er mars dernier, l'assemblée a voté une loi donnant le droit à la SACEM d'extorquer tout ceux qui utilisent des oeuvres dont l'auteur ne veut pas être connu. La SACEM est une société de droit privé qui a le monopôle de la collecte des droits d'auteur. Ce qui devrait être fait par l'état, c'est une société privée qui le fait sans contrôle réel. La collecte et la répartition sont totalement opaque. Les salaires des dirigeants sont outrageusement élevés pour une société sans concurrence.

Si je veux payer moins d'impôt, je monte une société bidon aux USA avec une succursale au Luxembourg, pour diffuser de la musique en Europe, et j'appelle ça iTune ou amazon. Et grâce à HADOPI, je regarde la France et les éditeurs de musique dépenser des millions pour que mon chiffre d'affaire monte sans rien faire, tout ça au nom de l'exception inculturelle française.

Mais surtout, beaucoup d'internautes produisent et diffusent leur œuvre sur internet. Qui est-on pour juger qu'un journaliste est meilleur qu'un bloggueur ? Qu'une chaîne de télé est meilleure d'un blog vidéo sur Youtube ? Quand un internaute assemble plusieurs sources et réussit à être plus vu que chacune des sources qu'il a utilisé (comme pour "Bed Intruder Song"), doit-il être bloqué par les lois sur le droit d'auteur ou ces lois doivent être assouplies ?

Si une protection mesurée encourage la créativité et lui permette de se rémunérer, trop de protection prend en otage la culture. Par définition, la culture est l'ensemble des connaissances et traditions communes à un groupe. Par définition, la culture est partégée et doit se partager.

Le piratage n'est pas l'ennemi de l'industrie du divertissement

Les plus gros producteurs de films en volume, ne sont pas la France, ni les USA. Ce sont l'Inde et le Niger ; des pays où le piratage fait partie de la culture. Les jeux vidéos sont tous systématiquement piratés, et pourtant un jeu vidéo coûte plus cher à produire qu'un film hollywoodien : rentabilité et piratage vont forcement ensemble.

Toutes les études démontrent que les premiers consommateurs de biens culturels sont aussi ceux qui piratent le plus. Ainsi un bien piraté n'est pas une perte sèche pour l'industrie du divertissement, mais c'est un nouveau futur consommateur. D'ailleurs, le budget des ménages n'a jamais été extensible à l'infini. La part "culturel et loisir" dans le budget des ménages est resté inchangée. Elle s'est juste transférée des disques ver les concerts et festivaux, des DVD vers les places de cinéma.

La collecte de la SACEM est en constante progression. Le cinéma bât son record d'entrées d'années en années depuis plus de dix ans !

Quand le CD est arrivé, l'industrie du disque n'en voulait pas. C'est Sony, qui l'a imposé en rachetant Polygram pour le renommé "Sony Music". L'industrie du disque a toujours été la moins claire-voyante, qui a toujours répéter ses erreurs de jugement. La cassette audio, la radi, les chaînes de télé musicales, le disques vinyles, ont été combattus en leur temps par les éditeurs de musiques. A chaque fois, ils ont eu tord, et ne se sont jamais autant gavé par la suite grâce à ces innovations. Et il y en a encore pour les écouter ?